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Postes Canada refuse de récupérer les armes bannies par le fédéral

Le gouvernement Trudeau cherche encore le moyen de remplir sa promesse électorale.

Un homme tient une arme AR-15 dans ses mains.

Le gouvernement fédéral a banni des milliers de types d’armes comme ce AR-15 en 2020 et promet maintenant de les racheter.

Photo : La Presse canadienne / JONATHAN HAYWARD

Jusqu’à tout récemment, le gouvernement fédéral espérait que les comptoirs de Postes Canada – entre deux ventes de timbres – joueraient un rôle clé dans le programme de rachat de 144 000 armes à feu de type militaire.

Selon plusieurs sources, toutefois, Postes Canada vient de refuser que les bureaux de poste servent à recueillir les armes bannies en 2020, comme les AR-15.

Pour expliquer son refus de recueillir ces armes, Postes Canada a invoqué des préoccupations quant à la sécurité de ses employés, explique-t-on au sein du gouvernement.

La société d’État craint notamment des interactions conflictuelles entre ses employés et les détenteurs d’armes à feu, y compris notamment ceux qui contestent le processus de confiscation de leur propriété privée.

Cette décision complique la donne pour les libéraux de Justin Trudeau, qui ont promis un programme de rachat aux élections de 2019 et 2021. Le gouvernement souhaite le mettre en œuvre d’ici les élections prévues à l’automne 2025, mais le processus de rachat n’a pas encore été annoncé.

Plusieurs sources fédérales croient encore que le service postal est la manière la plus efficace et la moins coûteuse de récupérer des armes bannies, qui ne peuvent plus être utilisées ou vendues au Canada depuis quatre ans.

Ces sources déplorent la décision de Postes Canada, notant que la société d’État livre déjà des armes à feu vendues en ligne partout au pays.

Des camions de Postes Canada dans un stationnement

Des camions de livraison de Postes Canada.

Photo : Radio-Canada / Oliver Walters/CBC News

Selon le processus envisagé à Ottawa, les détenteurs d’armes bannies recevraient des boîtes dans lesquelles ils placeraient leurs armes déchargées et sécurisées, avant de les redonner au gouvernement.

Une fois récupérées, les armes seraient détruites ou rendues inopérables, et les propriétaires seraient dédommagés par le gouvernement.

Le gouvernement continue de discuter avec Postes Canada, mais il semble de plus en plus probable que son rôle pourrait se limiter au transport d’armes après qu’elles auront été remises à une autre entité.

C’est une épreuve qu’on traverse actuellement, mais on ne pense pas que cela mette en péril l’échéancier qu’on s’est donné ni la volonté du gouvernement d’aller de l’avant, résume une de nos sources, qui n’avait pas l’autorisation de discuter publiquement du dossier.

Postes Canada n’a pas répondu à nos questions sur ce dossier, et le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes n’a pas voulu commenter la situation.

1500 types d’armes bannies

Le programme de rachat a été annoncé officiellement en mai 2020, quelques jours après la tuerie de masse de Portapique, en Nouvelle-Écosse, qui a fait 22 victimes. Le tueur possédait illégalement cinq armes à feu, dont trois qui avaient été importées sans permis des États-Unis.

Justin Trudeau lors d'un point de presse sur son programme de contrôle des armes à feu.

Le chef libéral Justin Trudeau qui énonce son programme de contrôle des armes à feu en campagne électorale le 5 septembre 2021 à Markham, en Ontario. (Photo d'archives)

Photo : La Presse canadienne / Nathan Denette

Lors de cette annonce, 1500 modèles et variantes d’armes ont été prohibés au pays. Les armes bannies incluent le AR-15, qui a été utilisé dans de nombreux massacres aux États-Unis, et le Ruger Mini-14, soit l’arme utilisée lors de l’assassinat de 14 femmes à l’École polytechnique de Montréal en 1989.

Ces armes n’ont été conçues qu’à une seule et unique fin : tuer le plus grand nombre de personnes le plus rapidement possible, avait alors déclaré le premier ministre. À travers le pays, beaucoup de gens utilisent des armes à feu de façon légale et responsable, que ce soit pour travailler ou pour chasser. Mais vous n’avez pas besoin d’un AR-15 pour abattre un cerf.

Le gouvernement s’était initialement donné une période de deux ans pour retirer ces armes de la circulation au pays. La période d'amnistie, qui exige que les propriétaires d’armes à feu bannies les conservent à la maison sous clé, a depuis été prolongée jusqu’à la fin d’octobre 2025.

Après la tuerie à Polytechnique, il y a bientôt 35 ans, une pétition de plus de 500 000 noms a été déposée à la Chambre des communes à Ottawa. On y demandait d’interdire à quiconque en territoire canadien de détenir une arme militaire ou paramilitaire, sauf aux militaires et aux agents de la paix.

Des étudiants devant des boîtes de documents à la Chambre des communes en mars 1991.

En mars 1991, des étudiants de l’École polytechnique ont déposé à la Chambre des communes des boîtes contenant les signatures de plus de 500 000 personnes en faveur d'un contrôle des armes à feu. (Photo d'archives)

Photo : Archives PolySeSouvient

Le mouvement en faveur du contrôle des armes à feu souhaite que le Canada s’inspire du modèle de la Nouvelle-Zélande et rachète les armes bannies le plus rapidement possible. En 2019, ce pays a récupéré 56 000 armes semi-automatiques quelques mois après qu’un suprémaciste blanc a tué 51 personnes et fait des dizaines de blessés dans deux mosquées.

Un rachat compliqué

Ottawa avait initialement espéré obtenir la collaboration des provinces et des différents corps policiers au pays pour recueillir les armes à feu. Toutefois, le gouvernement fédéral a essuyé une série de refus, notamment de quatre provinces où la mesure fait face à une vive opposition.

Du côté du Parti conservateur du Canada, qui mène dans les sondages nationaux, il n’est pas question de mettre en œuvre le programme fédéral de rachat si les troupes de Pierre Poilievre prennent le pouvoir.

Parmi ses énoncés politiques, l’opposition officielle affirme qu’un gouvernement conservateur ne privera pas les citoyens canadiens des armes à feu détenues légalement.

Au lieu de s'attaquer aux gangs et aux armes à feu de contrebande, les libéraux mettent en place un programme de rachat d'armes à feu qui punit les propriétaires légitimes et ignorent la source réelle de la plupart des crimes commis avec des armes à feu au Canada, affirme le député conservateur Pierre Paul-Hus dans une déclaration écrite.

Pour les détenteurs d’armes aujourd’hui prohibées, le délai entre le bannissement et le rachat est trop long et engendre de nombreux problèmes en matière d’entreposage d’armes inutilisables.

Copropriétaire d’un centre de tir à L’Ange-Gardien, en Outaouais, Pierre Pharand dénonce le flou entourant le processus de rachat d’armes à feu achetées légalement.

Pierre Pharand est copropriétaire du Club de tir de l'Outaouais.

Pierre Pharand, copropriétaire d'un centre de tir, attend toujours le rachat de ses armes à feu bannies en 2020 par le gouvernement fédéral.

Photo : Radio-Canada / Daniel Leblanc

Selon lui, le fait de racheter des armes de citoyens qui respectent les règles d’entreposage et d’utilisation n’augmentera pas le niveau de sécurité au Canada. Il dénonce plutôt l’utilisation du thème du contrôle des armes à feu à des fins politiques.

Les armes qui sont bannies, c'est banni, je ne peux pas rien faire avec, je ne peux pas les passer, ça accumule la poussière. Puis on attend, se plaint-il. Ils n’ont jamais racheté les armes.

Le gouvernement a promis de procéder au rachat des armes en deux phases, en commençant par les armes encore entre les mains de commerçants, avant de procéder au rachat d’armes entre les mains de particuliers au pays. La première phase pourrait être amorcée prochainement, mais la deuxième sera plus longue et compliquée.

Selon une liste de prix proposés par le gouvernement fédéral, celui-ci offrira de 1300 $ à 6200 $ (Nouvelle fenêtre) pour chaque arme rachetée. Le budget total du programme de rachat évoluera selon la méthode choisie, mais le coût sera dans les centaines de millions, et pourrait même dépasser le milliard de dollars.

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