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Voyager avec la poésie dans le métro

Deux mois après son retour, la poésie dans les transports en commun à Toronto inspire des passagers et place la parole des poètes au cœur de l'espace public.

Addesse Haile à gauche et Latif Murji à droite sur le quai d'une station de métro à Toronto. À l'avant-plan, des passagers dans un wagon de métro.

Addesse Haile (à gauche) et Latif Murji (à droite) ont ramené la poésie dans les transports en commun de Toronto en février dernier.

Photo : Rukhsar Jaffer

Il est 8 h à Toronto et le métro est bondé. À l’entrée d’une rame, une vingtaine de passagers ont le visage collé sur leur téléphone, complètement absorbés. Un peu plus loin, des passagers observent attentivement un poème qui retient leur attention parmi les annonces publicitaires et partagent leurs impressions.

Britta Badour, mieux connue sous le nom de Britta B., pense que « Poems in Passage », le programme d'art public qui apporte la poésie dans les transports en commun de Toronto, atteint un nouveau public généralement désintéressé de ce genre littéraire.

L'artiste propose aux passagers d'être présents avec la poésie plutôt que de vivre leur vie en mode de pilotage automatique.

Britta Badour prend la pose devant des arbustes.

Britta B., poète en résidence avec « Poems in Passage », espère que la poésie puisse transporter les passagers de la CTT.

Photo : Gilad Cohen

Dans une autre rame de la ligne 2 Bloor-Danforth, Maryn Madoff, une usagère, lit un poème de Rumi : Ghazal (Ode).

Beaucoup de gens se sentent vraiment seuls et c’est un moyen de les inspirer afin qu'ils trouvent un sens à leur vie et d’être connectés à leur entourage, ce qui pourrait avoir un effet très puissant dans une grande ville, explique Maryn Madoff.

Un passager regarde le poème Ghazal (Ode) de Rumi sur un fond mauve dans le métro de Toronto.

Nolan Rush, un passager dans le métro, regarde le poème «Ghazal» (Ode) de Rumi, présenté en partenariat avec le Musée Aga Khan, en partie dans sa langue originale, le farsi.

Photo : Radio-Canada

Cet effet fait son chemin et ses bienfaits se constatent dans plusieurs commentaires envoyés aux artistes dont les poèmes sont affichés dans le réseau de la Commission de transport de Toronto (CTT).

J'ai vécu les cinq mois les plus difficiles de ma vie adulte, car j'ai souffert d'une perte et d'une trahison. Ce matin, sur la ligne Bloor, j'ai trouvé Song of Sheba et j'ai été époustouflée, peut-on lire dans la publication Instagram de la poète Adebe DeRango-Adem.

L'artiste décrit cette lettre comme la réaction à un de ses poèmes la plus émouvante qu’elle a reçue de sa vie.

Ça change bien des choses, ajoute la passagère dans son message.

Une poésie d'impact

Avoir un impact : c'était l’intention des fondateurs de « Poems In Passage », Latif Murji et Addesse Haile, lorsqu'ils ont ramené la poésie dans le métro, en février dernier, 12 ans après la disparition de « Poetry on the Way » (Poésie en chemin).

L’initiative vise à apporter une lumière au quotidien en offrant des moments de contemplation dans le métro.

D’une certaine façon, nous ouvrons l'esprit des gens à la poésie, à sa beauté et aux contributions artistiques de différentes communautés dans le monde en faisant en sorte que ce soit normal pour les gens de voir cela dans une ville multiculturelle comme Toronto, raconte M. Murji.

La Commission de transport de Toronto (CTT) soutient la mission de « Poems In Passage », qui met en valeur les œuvres de 12 poètes émergents et établis en donnant la priorité aux voix de groupes traditionnellement sous-représentés et en quête d'équité.

Plus de 100 affiches de chaque poème sont publiées dans près des trois quarts des autobus, des tramways, des rames de métro et des stations de la CTT depuis le début février.

La poète officielle de Mississauga, Andrea Josic, décrit la publication de son poème I text my love at Old Mill Station comme un point tournant dans sa carrière, qui lui procure un sentiment extraordinaire en voyant l'effet de sa poésie au quotidien dans les douzaines et les douzaines de messages reçus depuis.

Son poème, une lettre d’amour entre deux personnes qui vivent à des endroits opposés de Toronto, insiste sur l’importance d’être connecté malgré la distance. Que ce soit sur une petite distance, sur une ligne de métro, dans une ville ou dans un pays, cela évoque le sentiment de pouvoir relier l’amour à la distance et le désir d’être ensemble, soutient l'artiste.

Ce sentiment rejoint la réalité de plusieurs passagers torontois dont les familles sont à l'extérieur du pays.

Andrea Josic devant une série de cœurs rouges suspendus derrière elle.

« Poems In Passage » correspond à la mission d'Andrea Josic, en tant que poète officielle de Mississauga, de donner plus de visibilité à la poésie.

Photo : @kevinuncaged

Favoriser le sentiment d’appartenance avec le pouvoir des mots

Britta B. a participé à la sélection des poèmes. Elle explique avoir cherché à voir ce qu’elle pourrait décoder des œuvres des poètes, un sentiment, une musique, une mémoire, qui auraient un impact sur les gens, surtout en tenant compte du fait qu'il y a beaucoup de nouveaux arrivants et d'immigrants dans la ville de Toronto.

Il y a beaucoup de cultures et d'identités à Toronto. Nous voulions voir si nous pouvions toucher des gens qui, même s'ils ne se sentent pas directement interpellés par le poète, pourraient trouver dans les mots ou le code un moyen de se connecter, affirme-t-elle.

Lillian Allen, la poète officielle de Toronto, aime l’idée de ramener la poésie à la population et de ne pas l’enfermer dans une sorte de tour d’ivoire.

Olivia Chow à droite, remet un cadre de la proclamation officielle du mois national de la poésie à Lillian Allen à gauche

Lilian Allen a reçu la proclamation du mois national de la poésie des mains de la mairesse Olivia Chow le 17 avril.

Photo : Ville de Toronto

Elle se dit honorée de l’inclusion de son poème Growing Old(er) dans le programme « Poems in Passage » et des réactions qu’elle en reçoit, autant des jeunes que des gens plus âgés.

Une personne du quartier Jane et Finch m'a dit que chaque fois qu'elle pense à moi, elle voit des possibilités. Nous avons grand besoin de mentors, surtout pour les communautés marginalisées et les voix sous-représentées, déclare-t-elle.

Assurer la viabilité de la poésie dans les transports en commun

Latif Murji et Addesse Haile souhaitent assurer une pérennité au programme, tout comme l'espèrent plusieurs passagers.

L’initiative en est à sa première année et la CTT s’est engagée à la soutenir pour deux ans. Les fondateurs de « Poems in Passage » souhaitent aussi faire des bourgeons vers Montréal, Ottawa et d'autres villes canadiennes.

Les poètes qui veulent participer à la prochaine édition de « Poems in Passage » pourront soumettre leurs textes l’automne prochain.

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