Kuessipan : ce qui nous lie
Myriam Verreault signe un film fort et sensible, à voir sur ICI Tou.tv Extra.
Jeunesse et identité… Comme dans son premier – et culte – film, coréalisé avec Henry Bernadet, À l’ouest de Pluton, Myriam Verreault se penche sur ces vastes sujets, mais dans Kuessipan, cette fois, elle a une alliée de taille : l’écrivaine innue Naomi Fontaine, autrice de Kuessipan (roman paru en 2011) et coscénariste du film.
Kuessipan, c’est d’abord l’histoire de deux amies, Mikuan et Shaniss. Depuis leur tendre enfance, ces deux-là sont amies à la vie à la mort. Est-ce un rempart contre la vie parfois trop rude dans leur communauté innue près de Sept-Îles? Sûrement. Toutefois, alors qu’elles grandissent, la violence de leurs conditions de vie se révèle de plus de plus : physique, sociale, économique mais aussi amoureuse, familiale…. Et si l’une rêve de partir pour pouvoir étudier, l’autre, elle, se retrouve fille-mère.
À grands coups d’ellipses romanesques et judicieuses, Verreault les observe faisant face à ce dilemme impossible, décliné de 1001 façons : partir ou rester?
Les préjugés, les a priori, les idées reçues… personne n’en manque. Et dans Kuessipan, ils sont explorés chez chacun et chacune – personnes blanches et autochtones – en exposant chaque enjeu et chaque tristesse. Pourtant, à ces difficultés, le film répond aussi de la plus belle des façons : en créant de l’émotion, de la vraie, sans manipulation, ce qui rappelle alors une idée universelle.
Peu importe qui l’on est ou d’où l’on vient, ce qui aide à ne pas lâcher, c’est le sentiment d’appartenance, et Kuessipan, on s’en rend vite compte, s’il illustre bien sûr une réalité autochtone, montre en réalité des interactions et des émotions profondément humaines. Que celui ou celle qui ne se sent pas trembler devant cette scène magnifique de chant de Noël retourne dans sa grotte.
Cherchant à mythifier sans esthétiser (notamment grâce à une superbe photographie texturée et lumineuse), révélant la beauté (des lieux et des personnes), la mise en scène de Verreault touche juste.
Surtout, elle sublime le talent de deux jeunes femmes que l’on espère revoir souvent : Yamie Grégoire et Sharon Fontaine-Ishpatao.
Ce sont elles, simples, naturelles et touchantes, qui permettent au récit de s’élever, de toucher du doigt cette idée magnifique que les mots et les idées sont avant tout des outils au service d’une possible connexion à l’autre, de devenir aussi intime que collectif, et tragique que lumineux. Deux femmes puissantes.
Compléments
La bande-annonce (source : YouTube)