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François Legault demande à la police de démanteler le campement à McGill

Le ministre fédéral de la Justice et procureur général Arif Virani a pour sa part déclaré que les politiciens ne devraient pas s'ingérer dans le travail policier.

Un manifestant agite un drapeau palestinien devant une rangée de policiers.

Au plus fort de la manifestation et de la contre-manifestation, jeudi, à l'intérieur du campus de l'Université McGill ainsi que dans la rue face au campus, les membres des deux camps ont exprimé leurs points de vue sous l'œil attentif de policiers à vélo, à pied ou à cheval.

Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers

Photo d'une femme
Anne Marie Lecomte

Le premier ministre du Québec, François Legault, a affirmé jeudi qu'il s'en remettait à la police pour démanteler le campement propalestinien établi sur le campus de l'Université McGill, à Montréal.

En conférence de presse, François Legault a déclaré que le campement est illégal et que la loi doit être respectée. Je m’attends à ce que les policiers défassent ces campements-là, a-t-il dit. C'est ce que [l'Université] McGill a demandé.

M. Legault a tenu ces propos en dépit du fait que la Cour supérieure du Québec a rejeté mercredi une demande d'injonction (nouvelle fenêtre) qui visait à faire déplacer le campement.

Cette injonction avait été réclamée par deux étudiants de l'Université McGill qui souhaitaient ainsi limiter les manifestations propalestiniennes sur le campus et forcer le démantèlement du campement aménagé samedi dernier en signe de solidarité avec la population de Gaza.

François Legault lors d'un point de presse.

Le premier ministre François Legault dit s'attendre à ce que la police démantèle le campement établi sur le campus de l'Université McGill, à Montréal.

Photo : Radio-Canada / Sylvain Roy Roussel

Dans sa décision, la juge Chantal Masse a affirmé que l'intervention des tribunaux est parfois susceptible d'être un remède pire que le mal auquel on cherche à remédier.

En formulant le souhait de voir le campement démantelé, le premier ministre a précisé qu'il allait laisser les policiers décider du moment et de la manière dont ils allaient procéder.

Dans une déclaration transmise à Radio-Canada, la mairesse de Montréal Valérie Plante affirme : La priorité de notre administration et du Service de police de la Ville de Montréal en ce moment c’est de protéger les droits fondamentaux de notre société, d’assurer la sécurité de tous et éviter une escalade de tension comme on observe aux États-Unis.

Mme Plante ajoute : Montréal est une ville de paix et d’inclusion, dotée d’un service de police expérimenté qui sait faire son travail avec énormément de professionnalisme et de sensibilité. Nous devons leur faire confiance et nous unir derrière les lois et les droits qui nous unissent.

De son côté, le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) dit prendre acte de la décision rendue par la juge Masse de rejeter la demande d’injonction provisoire de deux étudiants de McGill, en raison de l’absence de démonstration d’une urgence.

Nous demeurons à l’affût de l’évolution de la situation, en maintenant la communication avec l’Université McGill et les manifestants. Rappelons que le rôle des policières et des policiers dans une telle situation est d’assurer la paix, le bon ordre, la sécurité des personnes, et ce, dans le respect des droits et libertés, ajoute le Service de police de la Ville de Montréal.

Le reportage de Jean-Philippe Hugues

Pas d'ingérence dans le travail policier, dit Arif Virani

À Ottawa, lors d'une mêlée de presse, le ministre fédéral de la Justice et procureur général du Canada Arif Virani a déclaré qu'à l'université, les étudiants apprennent à exercer leur sens critique et que cela doit être encouragé partout au pays.

Le ministre de la Justice, Arif Virani, parle derrière un lutrin.

Le ministre fédéral de la Justice, Arif Virani. (Photo d'archives)

Photo : La Presse canadienne / Sean Kilpatrick

Questionné sur ce qu'il pensait de la décision de François Legault de demander l'intervention des policiers à l'Université McGill, le ministre Virani a déclaré que les décisions opérationnelles des policiers doivent être prises indépendamment des politiciens. C'est toujours le cas dans une démocratie comme la nôtre, a-t-il dit.

Pour le ministre fédéral de la Justice, il est absolument nécessaire de respecter cette limite et de ne pas s'ingérer dans le travail des policiers. Les décisions opérationnelles doivent être les leurs, a-t-il dit au sujet du travail des policiers.

Les manifestations doivent se dérouler dans les limites fixées par la loi. En vertu de la Constitution canadienne, le droit à la liberté d'expression est protégé, mais la haine et l'intimidation ne le sont pas.
Une citation de Arif Virani, ministre fédéral de la Justice

Sur le terrain, tant la manifestation que la contre-manifestation se sont déroulées pour l'essentiel entre midi et 15 h. Les manifestants propalestiniens sont demeurés installés dans leur campement sur le terrain de l'Université McGill.

En face du campus, de l'autre côté de la rue Sherbrooke Ouest, des contre-manifestants pro-israéliens s'étaient regroupés, certains vêtus de gilets pare-balles.

Des manifestants pro-israël avec des pancartes.

Des contre-manifestants pro-israéliens, près du campement de l'Université McGill, jeudi

Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers

Sur un écran installé en face du campus de l'Université, des images de l'attaque du Hamas le 7 octobre dernier ont été projetées par moments.

Les effectifs du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) se sont postés de manière à séparer les deux groupes. Pendant quelques heures, les policiers ont bloqué la circulation sur la rue Sherbrooke Ouest, mais ils l'ont rétablie au milieu de l'après-midi. Sur le campus de l'Université, certains des policiers étaient à cheval.

En fin d'après-midi, la situation s'était calmée et n'avait donné lieu à aucune arrestation. Dans un camp comme dans l'autre, les manifestants ont pu exprimer leurs points de vue.

Une manifestation pro-israélienne s'est déroulée jeudi devant le campement propalestinien sur le campus de l’Université McGill, à Montréal.

Une manifestation pro-israélienne s'est déroulée jeudi devant le campement propalestinien sur le campus de l’Université McGill, à Montréal.

Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers

Du côté des personnes qui appuyaient la position israélienne, un homme a lancé un appel à la direction des universités Concordia et McGill pour qu'elles appliquent leurs règlements et protègent leurs étudiants juifs. Une dame qui se disait enseignante dans un collège a affirmé à Radio-Canada avoir été victime à Montréal, le mois dernier, d'un acte antisémite.

Du côté de celles qui soutiennent la cause des Palestiniens de Gaza, un rabbin membre d'un groupe ultra-orthodoxe opposé à Israël a affirmé que le fait de critiquer Israël n’est absolument pas antisémite, au contraire, et qu'il est dangereux de faire l’amalgame des deux.

Le judaïsme est une religion, alors que le sionisme est un mouvement politique, a-t-il ajouté en saluant le courage des étudiants présents dans le campement.

Une femme a la tête recouverte d'un keffieh et côtoie un homme qui, lui, porte la kippa.

Dans le campement propalestinien établi sur le campus de l'Université McGill à Montréal, une manifestante est coiffée du keffieh et un manifestant porte la kippa.

Photo : Radio-Canada / Rania Massoud

De plus, une cinquantaine de Juifs propalestiniens ont formé une ligne en face des manifestants pro-israéliens. Parmi eux, un membre du groupe Voix juives indépendantes a dit vouloir protéger le campement.

L'artiste et militante kanien'keháka (mohawk) Ellen Gabriel était là elle aussi. Je me soucie de tout le monde, peu importe d'où ils viennent, a-t-elle dit. Je suis ici parce que je veux la paix dans le monde.

Mme Gabriel, qui a dit être présente en signe de soutien au peuple palestinien, a affirmé qu'il est inconcevable que des enfants meurent de faim, soient séparés de leurs parents et soient jetés en prison.

Ellen Gabriel sourit et porte un keffieh autour du cou. Un policier à l'arrière-plan observe la scène à côté de son vélo.

L'artiste mohawk Ellen Gabriel a dénoncé le fait que des enfants soient pris au piège dans la guerre qui fait rage dans la bande de Gaza.

Photo : Radio-Canada / Rania Massoud

À Québec, les partis d'opposition réagissent

Le chef de l'opposition officielle, le libéral Marc Tanguay, a dénoncé l'appel lancé aux policiers par le premier ministre Legault afin que ceux-ci démantèlent le campement.

Sur le ton de l'ironie, il a déclaré : Quelle belle application, encore une fois, du respect de notre société de droit!

Christine Labrie, nouvelle porte-parole féminine de Québec solidaire (nouvelle fenêtre) en remplacement d'Émilise Lessard-Therrien, a dit qu'elle s'expliquait mal la décision de François Legault d'intervenir là-dedans.

Ça risque d'envenimer les tensions, parce qu'on avait jusqu'à maintenant un campement qui était pacifique.
Une citation de Christine Labrie, co-porte-parole de Québec solidaire

Enfin Pascal Paradis, du Parti québécois (PQ), a rappelé que dans sa décision, mercredi, la juge de la Cour supérieure du Québec avait lancé un appel en faveur d'une solution pacifique à l'Université McGill. Le gouvernement [du Québec] devrait faire de même, a dit le député.

Des manifestants arborent le drapeau israélien.

Des manifestants qui soutiennent l'intervention d'Israël se sont rassemblés autour de l'Université McGill, à Montréal, en signe de soutien aux otages israéliens, le 2 mai 2024.

Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers

Des campements dans d'autres provinces canadiennes

Au pays, sur d'autres campus universitaires, des campements ont aussi été établis.

À l'Université de Toronto, où un campement propalestinien a été aménagé (nouvelle fenêtre), la direction a prévenu les étudiants qui manifestent qu'ils pourraient être suspendus.

Avec les informations de Rania Massoud, Catherine Gauthier, Mélanie Meloche-Holubowski, Éric Plouffe, Christian Noël et Jean-Philippe Hugues

Avec les informations de La Presse canadienne.
Photo d'une femme
Anne Marie Lecomte

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