En 2002, au Canada, 2,3 milliards de coupons de réduction ont été imprimés. De ce nombre, les consommateurs en ont échangé 110 millions. C'est moins de 5 %. Pourtant... « Lorsqu'on demande aux Québécois "Avez-vous utilisé un coupon la semaine dernière?", autour de 35 % des Québécois répondent qu'ils ont utilisé un coupon » indique Luc Dupont, professeur en marketing à l'Université d'Ottawa.

JoAnne Labrecque, professeur en marketing aux HEC de Montréal, ajoute : « Ça s'inscrit dans un programme global pour inciter les gens soit à fréquenter un magasin particulier, soit à acheter une marque en particulier. »

Les avantages des coupons

Le succès des coupons s'explique aisément. Les consommateurs y trouvent leur compte, tout comme les manufacturiers et les détaillants.

« Avec le temps, on s'est aperçu, particulièrement dans le marketing alimentaire, que les gens sont relativement fidèles à une marque de produit, explique M. Dupont. On a, par exemple, sa marque de café, sa marque de thé, sa marque de boisson gazeuse... Le coupon, dans tout ça, vous donne le goût, l'espace d'une semaine ou deux, de jouer à l'infidèle. »

Les compagnies attirent ainsi de nouveaux clients, sans perdre ceux qui sont déjà fidèles à leurs produits et qui paient le plein prix sans coupon. Autre avantage pour le manufacturier : connaître la proportion des coupons échangés et prévoir le volume de ses ventes à rabais. Les coupons placés sur les tablettes ou imprimés sur les emballages comblent ces attentes en plus de fidéliser la clientèle.

Les inconvénients des coupons

Mais les coupons ont aussi des effets pervers. « Avec le temps, on s'est aperçu qu'on est en train de créer une génération de gens qui vont s'en remettre quasi exclusivement aux coupons, poursuit M. Dupont. Ce sont des "infidèles chroniques". »

Autre inconvénient : les coupons coûtent cher. Après l'impression, la distribution : les coupons passent de votre main à celle de l'épicier, qui l'envoie à une maison d'échange pour être remboursé. La maison d'échange l'achemine au manufacturier pour être, elle aussi, remboursée. C'est bien des manipulations! Alors pourquoi ne pas tout simplement baisser les prix à la base, à la caisse?

« Lorsqu'on fait participer les gens, poursuit M. Dupont, qu'on leur demande simplement de découper un petit coupon au lieu de leur donner un cadeau sans trop d'efforts, les chances que les gens adoptent le produit, qu'ils l'utilisent et que ça devienne un achat régulier sont plus importantes. »

La fidélisation du client est aussi une préoccupation de votre épicier détaillant, nous dit Mme Labrecque : « Dans le cas des détaillants d'alimentation, le défi est d'avoir un ensemble de produits en réduction à chaque semaine pour inciter un certain groupe de consommateurs à aller faire leurs achats auprès des magasins de cette chaîne ».

Tous les épiciers n'adhèrent cependant pas à la politique des coupons de réduction. Provigo les a retirés de ses cahiers publicitaires. IGA ira bientôt dans la même direction. Métro, de son côté, garde le coupon traditionnel, qui continue d'avoir la cote.

Malgré ces changements de stratégie, il est peu probable que le coupon à découper disparaisse, selon M. Dupont : « Tant que les gens trouveront du plaisir à découper les coupons, tant qu'on va constater que parce qu'ils ont découpé un coupon, ils ont fini par adopté une marque, à y être plus fidèle, on peut présumer que le fameux coupon à découper, avec ses fameux petits ciseaux imprimés autour pour bien comprendre qu'il faut aller chercher une paire de ciseaux, on peut présumer que c'est un outil de promotion qui continuera à être utilisé! »