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Émission du mercredi 11 août 2004 à 20 h
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Le prix des fromages fins québécois
[enquête du 22 janvier 2004]

De nombreux fromages fins québécois ont réussi à se tailler une place rapidement sur le marché. Il faut dire que les goûts des consommateurs ont changé. Mais comment se fait-il que nous payons souvent ces fromages québécois plus cher que leurs équivalents importés de France?

Chez Hamel, une fromagerie réputée de Montréal, L'épicerie a comparé les prix de quelques fromages fins québécois à ceux de leurs cousins français. Les prix sont ceux affichés en janvier 2004.

 

 

Quelques comparaisons
Le Mi-Carême coûte 37,50 $/kg, soit 18 % moins cher que son équivalent importé, le Camembert Antignac, qui coûte 45,90 $/kg.
Mais, en général, les fromages québécois
coûtent plus cher que leurs équivalents français.
Par exemple, Lechevalier Mailloux coûte 45 % de plus que son cousin, le Maroilles Fermier, soit 72,50 $/kg le premier, et 49,90 $/kg le second.
Pour sa part, le Saint-Basile-de-Portneuf coûte 38 % de plus que le Livarot Fermier (67,90 $/kg pour le Saint-Basile-de-Portneuf, 48,90 $/kg pour le Livarot Fermier).

 

Suivons la route du Migneron de Charlevoix

Regardons de plus près l'exemple du Migneron de Charlevoix, champion toutes catégories du Grand Prix des fromages canadiens en 2002. Chez Hamel toujours, on le trouve à 39,90 $/kg, tandis que le Port-Salut, son plus proche cousin français, se vend 23,50 $/kg. C'est presque 41 % moins cher! Comment cela se fait-il?

Premier arrêt: la maison d'affinage Maurice Dufour, à Baie-Saint-Paul. C'est ici qu'on fabrique le Migneron, une pâte demi-ferme à croûte lavée.


«Une croûte lavée, c'est le type de fromage monastique, type fromage Oka et Port-Salut, des fromages développés par des moines», nous dit Maurice Dufour, propriétaire de la maison d'affinage qui porte son nom.

 

M. Dufour le vend 26,50 $/kg au détail. Déjà, à la source, il coûte plus cher que le Port-Salut, qui se détaille 23,50 $/kg chez Hamel, à Montréal. Cet écart est surprenant, si l'on tient compte des frais de transport et de distribution liés à l'importation du Port-Salut.


«C'est normal que ce soit un peu plus cher pour certains produits, parce qu'en France, le lait est à peu près 60 % moins cher qu'ici», affirme Marc Picard, copropriétaire des fromageries Hamel.

 

Mais le prix du lait n'explique pas tout. Michel Morisset, directeur du programme d'économie et gestion agroalimentaire à l'Université Laval, explique: «On peut acheter présentement du cheddar à 13 $ le kilo, prix de détail, alors qu'on va payer les fromages fins entre 35 et 40 $, parfois 50 $ le kilo. Ça signifie qu'avec le même lait, payé à peu près le même prix, on fait un fromage qu'on vend 13 $ le kilo et un autre qu'on vend 50 $ le kilo.»


La méthode de production artisanale a, par contre, un bien plus grand impact sur le prix de détail, nous dit M. Morisset: «Puisque ces fromages sont faits en petite quantité, ça veut dire qu'ils sont faits de façon assez artisanale, très peu mécanisée. On utilise donc beaucoup de main-d'œuvre pour les faire. Le coût de la main-d'œuvre au Québec est, comme vous le savez, assez élevé.»


Il faut comprendre également que la plupart des fromages français d'importation sont fabriqués en quantité industrielle, comme le Port-Salut, par exemple. «Ils en fabriquent peut-être 1000 à 1500 meules par jour! Nous, après 1000 meules par semaine, c'est terminé», indique M. Dufour.

«Il ne faut pas établir le Migneron comme un fromage de masse, confirme M. Picard. C'est un fromage de spécialité. Dans les fromages de spécialité, on ne peut pas avoir des prix sur le volume.»

L'écart entre le Migneron et le Port-Salut s'accentue encore davantage quand on prend la route. À peine quelques rues plus loin, au IGA de Baie-Saint-Paul, déjà, le Migneron est passé de 26,50 $ à 29,59 $/kg, soit 10 % de plus qu'à la fromagerie qui le fabrique.

Plus on s'éloigne de Baie-Saint-Paul, plus la différence augmente:

  • À Québec, l'épicier indépendant J. A. Moisan vend le Migneron 39 $/kg, tandis que le marché IGA le vend pour sa part 53 $/kg;
  • Encore plus loin, à Montréal, la fromagerie Hamel le détaille à 39,90 $/kg;
  • Et dans un marché Métro à Laval, on en demande 56 $/kg;
  • Puis à Saint-Jovite, 63 $/kg!


«Il est certain que les boutiques spécialisées, comme nous, paient moins cher que le Métro, le IGA ou le magasin de bannière», affirme M. Picard.

 


M. Dufour exclut délibérément les grandes enseignes de son réseau de distribution, préférant ne livrer le Migneron qu'à des marchands indépendants et spécialisés, comme la fromagerie Hamel à Montréal, qui le paie 22,50 $ et le revend 39,90 $/kg, soit 77 % plus cher.


Ces marchands indépendants vendent alors à des distributeurs, qui font le relais jusqu'aux grandes enseignes, en se prenant, eux aussi, une marge de profit. À leur tour, les épiceries font encore augmenter le prix dans des proportions pouvant aller jusqu'à 94 %. La multiplication des intermédiaires finit donc par nous coûter cher!

 

Chaîne de distribution

Hamel achète le Migneron environ 22,50 $/kg
à Maurice Dufour et le détaille 39,90 $/kg

Augmentation
du prix :
77 %

Le distributeur le paye 26,50 $/kg à Hamel et le revend 32,45 $/kg

Augmentation
du prix :
22 %

Les épiciers le payent 32,45 $/kg au distributeur
et le revendent entre 52,99 $ et 63 $/kg

Augmentation
du prix :
de 72,5 % à 94 %
Au détail, de chez Dufour au Métro de Saint-Jovite,
le prix passe de 26,50 $ à 63 $/kg!
Un écart de 138 %!


M. Dufour n'a pas l'intention de vendre directement aux grandes chaînes. C'est, entre autres, une question de loyauté, dit-il: «Il y a beaucoup de relations humaines là-dedans. Il y a des gens qui nous ont mis en place, qui nous ont permis de monter, et je les garderai toujours dans ma "dynamique". J'ai été élevé comme ça!»

Il y a donc impasse. Les volumes de production sont petits, la fabrication coûte cher, la distribution est limitée... Pas étonnant qu'il y ait flambée des prix! Des prix que même M. Dufour trouve exagérés: «Le Migneron, ça ne vaut pas 63 $ le kilo. Ce n'est pas vrai! Il n'y a pas de fromage qui vaille 63 $ le kilo!»

Le fromage, comme le reste, ça se magasine! Si on veut tout trouver, même des produits fins, en un seul arrêt à l'épicerie, il faut y mettre le prix. Mais si on fait un petit détour dans une fromagerie spécialisée, c'est tout un monde de parfums et de saveurs qu'on découvre, et à meilleur prix!

 

 

COORDONNÉES:

Les fromageries Hamel

220, rue Jean-Talon Est (Marché Jean-Talon)
Montréal (Québec) H2R 1S7
Tél.: (514) 272-1161

2117, rue Mont-Royal Est, Montréal
Tél.: (514) 521-3333

9196, rue Sherbrooke Est, Montréal
Tél.: (514) 355-6657

622, rue Notre-Dame, Repentigny
Tél.: (450) 654-3578


SAVIEZ-VOUS QUE:

Le Canada produit plus de 300 fromages de spécialité, comprenant le fromage au lait cru et les fromages de chèvre et de brebis. C’est le fromage mozzarella qui est le principal fromage de spécialité produit.

La fabrication de fromage a augmenté de 287 000 tonnes, en 1990, jusqu’à 351 000, en 2000. La popularité du fromage mozzarella dans le secteur de la transformation secondaire représentant 33 % de tout le fromage produit, ainsi que le fromage cheddar, qui lui, en représente 38 %, sont les raisons de cette augmentation.

Selon Statistique Canada, il s’est consommé 11,55 kg de fromage par personne au Canada en 2002. Les plus populaires sont le cheddar et la mozzarella.

La qualité du cheddar vieilli canadien est devenue une norme de haut standard reconnue mondialement.

Le Québec produit près de 150 variétés de fromages fins. Avec 57 % de la production canadienne totale de cheddar et de fromages de spécialité, le Québec demeure le principal producteur de fromage au pays.

(Sources: Commission canadienne du lait, Producteurs laitiers du Canada, Centre canadien d’information laitière)


HYPERLIENS:

Encyclopédie des fromages canadiens
Site des Producteurs laitiers du Canada

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Pour les enquêtes de la saison 2002-2003, consultez notre section «Archives»

 

 

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