Dès l'aube, les pêcheurs quittent le port pour rapporter les cadeaux que la mer recèle. Parmi ceux-ci, on trouve le thon, un poisson riche en protéines, pauvre en calories et facilement digestible. Achetée fraîche, cette merveille atteint un prix très élevé : près de 50 $ le kilo, un véritable luxe.

La plupart d'entre nous consommons plutôt le thon sous forme de conserves; c'est peut-être moins spectaculaire, mais le coût est bien moindre. Première observation : en quelques années, le format de la majorité des boîtes de thon a diminué. Le prix, lui, est resté constant.

Le thon pâle émietté coûte en moyenne 0,99 $, alors que le thon en morceaux est un peu plus cher, soit environ 1,19 $. Le tout nouveau thon en sachet de la compagnie Clover Leaf est bien pratique, mais il coûte presque le double du thon émietté, alors qu'il contient deux fois moins de thon. Quant au thon blanc, le haut de gamme, il peut coûter jusqu'à trois fois plus cher que le thon émietté (2,97 $ dans notre exemple).

Les acides gras oméga-3

Blanc ou pâle, le thon est idéal pour ceux qui se préoccupent de leur santé. Le thon, comme plusieurs autres poissons, contient des oméga-3, de précieux acides gras essentiels. « Ce qui fait varier la quantité d'oméga-3 dans le poisson, nous explique Michel Lucas, professeur au Centre de recherche CHUL-CHUQ, c'est la quantité de matières grasses dans le poisson. Plus un poisson contient de matières grasses, plus il contient d'oméga-3. »

La famille des oméga-3 se compose de plusieurs acides gras différents. Deux d'entre eux, le DHA (acide docosahexaénoïque) et l'EPA (acide eicosapentaénoïque), contribuent à la santé du système cardiovasculaire, à la protection des membranes cellulaires et ont, en plus, des effets anti-inflammatoires.

Seuls certains poissons recèlent du DHA et de l'EPA. Il s'agit du maquereau, du saumon, du thon et des sardines. « Ce qu'il faut savoir avec les oméga-3, poursuit M. Lucas, c'est qu'on en consomme tellement peu qu'aucun apport n'est négligeable. Les poissons, il faut en consommer de diverses sortes et le plus souvent possible. »

Mais lorsqu'on mange du thon en boîte, reste-t-il de ces bons acides gras? L'épicerie a fait tester neufs boîtes de thon en conserve afin de mesurer les quantités d'EPA et de DHA dans chacune d'entre elles. Résultat : tous nos échantillons en contiennent, mais le thon blanc contient trois fois plus de DHA et d'EPA que le thon pâle.

Lorsqu'on observe l'anatomie du thon, on remarque que son gras est concentré à un endroit précis de son corps, sous sa ligne latérale. Or cette partie du thon, qui contient le plus d'EPA et de DHA, est complètement enlevée lors de la mise en conserve. Son goût prononcé déplaît aux consommateurs.

Tom Gill, professeur à l'Université Dalhousie, en Nouvelle-Écosse, est l'un des rares spécialistes canadiens de la transformation du thon en conserve. Il nous explique ce qui est fait avec cette partie plus riche en oméga-3 : « Cette partie est complètement enlevée lors du processus de mise en conserve. [...] Elle est incorporée dans la nourriture pour chat... malheureusement! Si vous voulez consommer des oméga-3, vous feriez mieux de manger un autre poisson, le saumon en conserve par exemple. Il contient plus d'oméga-3 que le thon en conserve parce son gras est réparti dans ses muscles, contrairement au gras du thon, qui se concentre seulement à un endroit précis dans son organisme. »

Le mercure

Hélas, le thon ne contient pas que de bons acides gras essentiels. On constate depuis quelques années que le thon contient du mercure. Dans quelles boîtes de thon en conserve en trouve-t-on le plus?

L'Institut des sciences de l'environnement de l'Université du Québec à Montréal a analysé le contenu en mercure de 59 boîtes de thon de toutes sortes. Donna Mergler, professeure à l'Université du Québec à Montréal, nous fait part des résultats : « Le thon blanc que nous avons analysé contient sept à huit fois plus de mercure que le thon pâle, peu importe les compagnies qui le produisent. Il y a encore plus de mercure dans le thon dans l'eau que dans le thon dans l'huile. »

À première vue, il semble étrange que le thon blanc en conserve soit le meilleur quant à la quantité d'oméga-3 et, en même temps, le pire pour le contenu en mercure. Comment cela est -il possible?

C'est simple : la taille du thon fait toute la différence. Plus le thon est gros, plus il contient de mercure, car il s'est nourri pendant plusieurs années de poissons plus petits qui en contenaient. À forte dose, le mercure provoque des problèmes neurologiques graves, une réduction de la vision et des retards de développement importants chez les nouveau-nés.

Au Canada, la teneur en mercure d'un poisson ne doit pas dépasser la norme de 0,5 parties par million exigée par Santé Canada. Toutefois, plusieurs boîtes de thon blanc en conserve analysées par l'Université du Québec à Montréal dépassaient cette norme. « Le problème, estime Mme Mergler, c'est pour ceux et celles qui en consomment tous les jours, ou aux deux ou trois jours. À ce moment-là, il faut être sûr de bien choisir les poissons qu'on mange. »

En résumé

Le thon blanc en conserve peut être mangé occasionnellement, histoire de laisser le temps à l'organisme d'éliminer le mercure. Par contre, on peut manger souvent du thon pâle parce qu'il contient beaucoup moins de mercure. Même si le thon pâle contient moins d'oméga-3 (de DHA et d'EPA) que le thon blanc, il en contient tout de même suffisamment pour que nous en retirions des bienfaits. En plus, c'est celui qui coûte le moins cher!